Capture d’écran 2022 07 27 à 13.01.47
Capture d'écran d'une vidéo Twitter de l'équipe des Manly Sea Eagles du 24 juillet montrant le maillot arc-en-ciel.

Australie : un coach de rug­by s'excuse auprès de ses joueurs pour avoir vou­lu leur faire por­ter un maillot aux cou­leurs LGBT+

Sept rugbymen de l’équipe des Manly Sea Eagles en Australie ont boycotté un match décisif, contestant l’initiative de leur club de porter des maillots arc-en-ciel en soutien à la communauté LGBT+.

En Australie, sept rugbymen de l’équipe des Manly Sea Eagles ont pris la décision de ne pas participer au match contre les Sydney Roosters ce jeudi 28 juillet, un match pourtant crucial pour se qualifier dans la suite du prestigieux championnat de la National Rugby League (NRL). La raison évoquée : leur refus de se vêtir d’un maillot aux couleurs LGBT+. L’initiative menée par le club, la toute première de l’histoire de la Rugby League australienne, partait de l’intention de « soutenir l’activisme et les droits humains liés au genre, à la culture, à l'ethnie, et aux mouvements LGBT+ », comme l'a rappelée l’entraîneur de l'équipe, Des Hasler, lors d’une conférence de presse mardi 26 juillet.  

Les sept joueurs - Josh Aloiai, Jason Saab, Christian Tuipulotu, Josh Schuster, Haumole Olakau’atu, Tolu Koula et Toafofoa Sipley - ont justifié leur boycott en invoquant leurs convictions religieuses et culturelles. Leur décision fait écho, côté français, au refus similaire du footballeur du PSG, Idrissa Gueye, d’arborer un maillot au flocage arc-en-ciel lors de la journée dédiée à la lutte contre l’homophobie le 14 mai dernier.

Lire aussi : Julien Pontes du collectif Rouge Direct : « Le refus d’Idrissa Gueye est révélateur d’une homophobie systémique dans le football »

Rétropédalage du coach

Le coach des Manly Sea Eagles, Des Hasler, a donc pris la parole le mardi 26 juillet pour faire le point sur cette situation qui défraye la chronique dans le pays. L’entraîneur s’est excusé pour les « graves erreurs » commises par le club, en admettant qu’il y avait eu « peu de consultation ou de collaboration avec les joueurs concernés » pour décider du port du maillot LGBT+, comme le rapporte le média sportif australien Fox Sports. Des Hasler a même présenté ses excuses aux sept rugbymen en expliquant qu’ils ont été « négativement affectés après avoir découvert seulement cette semaine » qu’ils devraient porter un tel jersey.

Le capitaine des Manly, Daly Cherry-Evans a également soutenu ses sept coéquipiers durant la conférence de presse, même s’il ne partage pas leur choix : « En tant que personne, nous avons le droit de décider de nos propres actions. Avec ces actions, leurs conséquences et leurs répercussions, nous devons simplement nous assurer que les choses ne dégénèrent pas, et nous ferions mieux de soutenir nos coéquipiers et leur décision. »

Un soutien au sept joueurs qui ne passe pas

Pour de nombreuses personnalités du monde sportif, ce refus de soutenir la communauté LGBT+ en revêtant de simples bandes arc-en-ciel est symptomatique d’une homophobie ancrée dans le sport. Certain·es sont resté·es perplexes face aux excuses apportées par Des Hasler aux athlètes récalcitrants. « Imaginez, en 2022, devoir s’excuser de vouloir promouvoir l'inclusion et la diversité », pouvait-on lire sur le compte Twitter du commentateur Warren Smith. « Des Hasler qui s’excuse pour les erreurs importantes du club pose une question… Si les joueurs avaient été consultés avant et les sept s’y étaient objectés, est-ce que l’équipe Manly aurait quand même continué de mener l’initiative ? », s’est interrogé le journaliste australien James McKern.

Les réactions indignées ont fusé sur les réseaux sociaux. « Tu peux être religieux et quand même accepter et soutenir la communauté LGBT+. Les intolérants qui utilisent la religion comme une excuse ou une justification ne passent pas, selon moi. Ça devrait être les sept joueurs qui demandent pardon, pas Des Hasler », a affirmé la journaliste sportive Cath Durkin. « Aucun club ne devrait avoir à s’excuser pour avoir prévu de porter un arc-en-ciel sur leur maillot. Point final », s’est insurgé le consultant spécialiste du rugby, Scott Bailey. Un tweet qui a fait réagir plusieurs internautes, avec ce genre de réponse : « En oubliant la question de la religion, personne, nulle part sur Terre, toute profession confondue, ne devrait être forcé de faire quelque chose contre son gré. Point final. »

La journaliste sportive Pam Whaley s’est elle aussi révoltée et a attesté, dans un article pour le média Code, de l’hypocrisie des sept joueurs, supposément heurtés dans leurs convictions personnelles mais d’ordinaire tolérants au sujet d'autres faits condamnables. « Ce qui m’exaspère, c’est que les joueurs boycotteront un maillot arc-en-ciel, mais ne boycottent jamais un coéquipier accusé de violence contre les femmes ou tout autre comportement répréhensible qu’ils seraient tous d’accord de ne pas tolérer. Je ne comprends pas », s'est-elle emporté sur Twitter.

Une décision très polémique 

Ce boycott a engendré une polémique qui embrase le milieu sportif depuis le début de semaine. Dans le média australien The Sydney Morning Herald, Ian Roberts, ancien membre des Manly et premier joueur de la NRL à avoir fait son coming-out en 1995, a publié une tribune poignante ce mardi 26 juillet pour livrer son point de vue sur la situation. Il s'est directement adressé aux sept joueurs concernés. ​​« Vous devez comprendre quelque chose : des adolescents meurent. Des enfants se tuent car ils pensent que le monde les hait juste parce qu’ils sont gays. Des épisodes comme celui-ci n’aident pas. Est-ce que vous comprenez ? Je vous implore de reconsidérer votre position. Cela ferait une grande différence pour eux », leur a demandé Ian Roberts. 

« Vous vivez des vies où vous êtes entièrement respectés pour le sport que vous jouez. Ne pouvez-vous pas comprendre la douleur endurée par la population gay, à qui on manquera de respect, peu importe ce qu’elle fait, juste parce qu’elle est gay ?, s’est attristé l’ancien joueur du club. Il y a un fait simple: vos actions ont alimenté cet irrespect. Nous voulons, et nous méritons, le même respect que nous vous accordons. » Il a également salué l’initiative du club, en relevant le besoin de mener d'autres actions similaires : « Le sport est politique, et il peut changer le monde. »   

Comme le raconte le média britannique Daily Mail, le Premier ministre australien, Anthony Albanese, s'est également emparé du sujet et a défendu le port du maillot aux couleurs LGBT+ en déclarant : « c’est une bonne chose que le sport tente de devenir plus inclusif. [...] Il est important que dans la société australienne, nous respectons chacun d’entre nous pour ce que nous sommes. » Comble de l'ironie : le nom du club de rugby, « Manly », signifie viril en français.

Partager
Articles liés

Inverted wid­get

Turn on the "Inverted back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.

Accent wid­get

Turn on the "Accent back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.