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Un livreur Deliveroo dans le Marais, Paris © Carl Campbell

Deliveroo sévè­re­ment condam­né pour avoir détour­né la régu­la­tion du tra­vail avec ses livreur·euses « faus­se­ment indépendant·es »

La pla­te­forme de livrai­son Deliveroo ain­si que trois de ses anciens diri­geants ont été décla­rés cou­pables de « tra­vail dis­si­mu­lé » et condam­nés à de lourdes amendes par le tri­bu­nal cor­rec­tion­nel de Paris. Une pre­mière dans le monde de l’emploi uberisé.

Après un pro­cès qui a pris place du 8 au 16 mars, le ver­dict est tom­bé en début d'après-midi ce mar­di 19 avril : la pla­te­forme de livrai­son Deliveroo est condam­née à une amende de 375.000 euros, la plus éle­vée pos­sible, et trois de ses anciens diri­geants ont éga­le­ment été visés par des sanc­tions indi­vi­duelles, pour avoir employé à moindres frais des livreur·euses au sta­tut de « faux indé­pen­dants ». Deux ex-​dirigeants écopent d'un an de réclu­sion avec sur­sis contre quatre mois et 10 000 euros d'amende pour le troi­sième, jugé com­plice. L’entreprise a aus­si été condam­née à ver­ser 50 000 euros de dom­mages et inté­rêts pour pré­ju­dice moral aux syn­di­cats qui s’étaient por­tés par­tie civile. 

Faux indé­pen­dants

Des sanc­tions de poids qui se sont ali­gnées sur les réqui­si­tions de la Procureur dénon­çant du « tra­vail dis­si­mu­lé aggra­vé » entre 2015 et 2017. Soit le recours de Deliveroo à des mil­liers de travailleur·euses au sta­tut d’indépendant·es alors que la pla­te­forme entre­te­nait avec iels des « liens de subor­di­na­tion juri­dique per­ma­nente » ain­si que le note l’Inspection du tra­vail dans un procès-​verbal de décembre 2017. Les livreur·euses étaient par exemple constam­ment mis·es sous pres­sion afin d’être les plus rapides pos­sible, au risque de perdre leur contrat s’iels ne se mon­traient pas à la hau­teur des attentes de la pla­te­forme, et ne pou­vaient pas fixer leurs tarifs, pré­ro­ga­tive pour­tant nor­ma­le­ment réser­vée aux indépendant·es. Plutôt que de les employer, Deliveroo aurait donc dû sala­rier ses livreur·euses afin de leur per­mettre « de faire valoir leurs droits sociaux dans les mêmes condi­tions qu'un sala­rié décla­ré : droit de grève, visites médi­cale, liber­té syn­di­cale, jours fériés…» comme l’a décla­ré la pré­si­dente de la 31e chambre. 

Surtout que cet arran­ge­ment avec la loi créait en outre une situa­tion de concur­rence déloyale par rap­port aux salarié·s déclaré·es, qui cotisent et pour les­quels leur employeur paye descharges sociales, ou aux autres entre­prises plus res­pec­tueuses des règles. Dans le cadre de l’enquête, la jus­tice avait d’ailleurs sai­si à titre conser­va­toire trois mil­lions d’euros sur le compte de la socié­té, l'équivalent d'une par­tie des coti­sa­tions sociales dont elle ne se serait pas acquit­tée en 2015–2016.

Le pre­mier juge­ment au pénal d'un emblème de l'ubérisation marque un dur­cis­se­ment légis­la­tif à l'égard de ces pla­te­formes. Début mars, au lan­ce­ment du pro­cès, Deliveroo rap­pe­lait avec confiance que « toutes les déci­sions de jus­tice ren­dues défi­ni­ti­ve­ment en France nous ont été favo­rables ». L'entreprise a annon­cé hier soir faire appel.

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