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Dua Lipa, Rachel Chinouriri, Girl in Red, St Vincent… nos recos musique du mois de mai

Avec ses innombrables jours fériés et ponts, le mois de mai est propice au repos et au relâchement. L’occasion de se plonger dans les dernières sorties musicales, avec les retours de la pop star Dua Lipa et de l’artiste indé St. Vincent, la confirmation du talent de la Norvégienne Girl in Red, et l’arrivée remarquée de la jeune Anglaise Rachel Chinouriri.

Radical Optimism, de Dua Lipa
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Quatre ans après avoir passé avec succès le cap fatidique du deuxième album et s’être imposée comme une véritable pop star, grâce aux irrésistibles sonorités disco de Future Nostalgia, Dua Lipa a la lourde tâche de faire mieux, ou au moins aussi bien, avec Radical Optimism. Pas facile, surtout que ce troisième disque arrive quelques semaines seulement après le retour remarqué de ses respectées consœurs Ariana Grande (Eternal Sunshine) et Taylor Swift (The Tortured Poets Department), dont l’aura et l’influence sur la pop ne sont plus à démontrer. Produit sous la houlette de Kevin Parker, leader du groupe indé Tame Impala, cet album devait remettre à l’honneur la pop psychédélique et la Britpop des années 1990. C’est, en tout cas, ce qu’avait promis la chanteuse britannique, originaire du Kosovo, en amont de sa sortie. Houdini et Training Season, les deux premiers singles du projet, laissaient d’ailleurs entrevoir une prise de risque musicale. Il n’en est finalement rien. Ou alors, seulement, par de très légères touches. Dua Lipa explore toutes les facettes de l’amour, des débuts excitants d’une relation (excellente piste d’ouverture End of an Era) à sa fin (These Walls, Happy for You), en passant par ses hauts et ses bas, sur des rythmes pop dansants plutôt traditionnels, mais néanmoins très agréables. Radical Optimism s’écoute sans aucun déplaisir, nous surprend même parfois avec quelques envolées audacieuses (Watcha Doing, French Exit et Falling Forever), mais on aimerait que l’artiste fende un peu plus l’armure, notamment dans l’écriture, et retrouve la fougue plus personnelle de ses débuts.

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Radical Optimism, de Dua Lipa, © WEA.

What a Devastating Turn of Events, de Rachel Chinouriri
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© Warner/Parlophone.

Dans le flux de musique produite et proposée en continu à notre époque, il est parfois facile de se laisser déborder, de se réfugier auprès des artistes que l’on connaît et d’écouter, par-ci par-là, quelques chansons de talents émergent·es. Il ne faudrait néanmoins pas passer à côté de la chanteuse britannique Rachel Chinouriri et de son premier disque What a Devastating Turn of Events. Car il est si rare aujourd’hui d’avoir un album aussi fort et cohérent dans la qualité des chansons, autant du point de vue de l’écriture que de l’orchestration. Du haut de ses 25 ans, l’autrice-compositrice anglaise, d’origine zimbabwéenne, aborde avec beaucoup de maturité et de réflexion des sujets lourds, comme les difficiles peines de cœur (My Everything, All I Ever Asked), la détestation de soi (My Blood), les diktats pesants de la société (I Hate Myself) et les pensées suicidaires (What a Devastating Turn of Events), à travers la mort de sa cousine, qui s’est ôtée la vie après une rupture. Mais Rachel Chinouriri fait aussi preuve de légèreté et d’humour, sur Neved Need Me, hymne pop-rock qui la voit se détacher d’un ex toxique, ou sur Dumb Bitch Juice, morceau rock expérimental où elle essaie de comprendre comment elle a pu se faire avoir par un homme qui n’en valait pas le coup. À ses débuts, la jeune artiste, parce que noire, a tout de suite été rangée du côté du R’n’B, de la soul ou du jazz. “On voit ma couleur de peau, avant d’entendre ma musique”, déplorait sur Instagram celle qui s’épanouit dans la pop et le rock indé. Avec ce premier album musicalement riche et audacieux, Rachel Chinouriri remet les pendules à l’heure. 

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What a Devastating Turn of Events, de Rachel Chinouriri. © Warner/Parlophone.

I’m Doing it Againt Baby !, de Girl in Red
ISAK JENSSEN

Do you listen to Girl in Red ?” (est-ce que tu écoutes Girl in Red ?). Cette question, qui fuse au sein de la communauté queer sur Internet, est une façon tacite de demander à une fille si elle aime les filles. L’artiste norvégienne s’est en effet érigée ces dernières années en véritable Sappho des temps modernes, capable de résumer l’expérience lesbienne adolescente en quelques vers aussi rocks que mélancoliques. “I don’t wanna be your friend/I want to kiss your lips” (Je ne veux pas être ton amie/Je veux embrasser tes lèvres) scandait-elle sur I wanna Be Your Girlfriend, morceau qui l’a propulsée à l’avant de la scène alternative en 2016, alors qu’elle n’avait que 17 ans. Depuis, Marie Ulven – de son vrai nom – a bien grandi. “I’m on a new level” (Je suis à un nouveau niveau), annonce-t-elle sur I’m Doing it Again Baby !, titre de son second album, sorti le 12 avril. Ce nouveau disque – moins à vif que ses projets précédents – se révèle léché et mature, emprunt d’une sonorité plus mainstream, comme celle que l’artiste a pu entendre lors de la tournée Eras, de Taylor Swift, dont elle a assuré la première partie sur plusieurs concerts en 2023. Si l’on regrette un peu que Marie Ulven ait délaissé ses sujets queer de prédilection sur certains morceaux au profit de thématiques plus populaires comme sur les titres You Need Me Now ? (avec Sabrina Carpenter) ou Too Much, l’artiste ne déçoit pas sur les morceaux qui la représentent le mieux. Ainsi, A Night to Remember raconte la soirée magique où elle a connu son ex-compagne, dans une réflexion pleine de tendresse sur la sérendipité des rencontres amoureuses, tandis que New Love s’épanche sur la douleur de voir une ancienne flamme avec un nouvel amour. Les deux titres sont délicieusement pop-rock et offriront assurément des beaux moments de musique live sur la tournée de l’artiste, qui se produira notamment au Zénith, à Paris, le 11 septembre prochain. 

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I’m Doing it Againt Baby !, de Girl in Red. © Columbia Records.

All Born Screaming, de St. Vincent
ALEX DA CORTE 1

St. Vincent ne craint pas les métaphores cauchemardesques. Avec son septième album, All Born Screaming (Tous né·es en hurlant), l’artiste américaine délivre un objet musical étrange et puissant. “I’m just like a hungry little flea” (Je suis comme une petite puce affamée), annonce-t-elle par exemple sur Flea, titre qui traite de l’amour comme d’une infestation de puces dévoreuses de cœur. Comparaison risquée aux yeux des Parisien·nes encore traumatisé·es par les punaises de lit, la chanteuse n’a sans doute jamais eu à mettre toutes ses fringues au congélateur. Elle ne doit cependant pas être étrangère aux vermines, omniprésentes à New York, ville à laquelle l’artiste dédie une chanson d’amour sur ce nouvel opus avec Power’s Out. Toile de fond de nombreux morceaux de St.Vincent – comme le splendide titre New York sur son album Masseduction –, la Grosse Pomme se pare d’une esthétique nouvelle dans le regard de l’artiste, qui l’imagine comme un fruit pourri de l’intérieur par ceux·celles qui l’habitent. St. Vincent trouve ainsi de la beauté dans les choses anodines ou mal aimées et imprègne tout ce qu’elle touche de son insaisissable romantisme. Les mélodies magnifiquement décousues des morceaux Sweetest Fruit, Broken Man ou Big Time Nothing nourrissent cette même impression de chaos maîtrisé, apaisant dans toute son incertitude. Et St. Vincent continue de s’imposer comme une créatrice singulière, refusant sans cesse de se laisser définir. 

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All Born Screaming, de St. Vincent. © Total Pleasure Records.

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